Libertaire

À la demande générale, je vais apporter des précisions sur certains termes qui pourraient porter légitimement à confusion chez les lecteurs de ce blogue.

Le libertarianisme, ou l’idéologie libertarienne, a pour clé de voûte le principe de non-agression, qui est une liberté dite négative (i.e. le droit de ne pas être agressé) et est un principe protégé par le droit de propriété, et préconise de limiter le plus possible les interventions de l’État. Cependant, la plupart des libertariens sont dits minarchistes et prônent les fonctions régaliennes de l’État (i.e. justice, police, défense nationale (et non pas « agression nationale »), monnaie). La forme la plus extrême du libertarianisme est l’anarcho-capitalisme (les anarcho-capitalistes sont souvent appelés les free marketers en anglais) qui nie toute légitimité de l’État et reconnaît la suprématie du droit de propriété.

Le libertarisme, ou l’idéologie libertaire, est presque tout à fait semblable au libertarianisme. En fait, les deux idéologies sont identiques concernant les libertés civiles et politiques et dans leur volonté de réduire le plus possible les interventions de l’État. La seule différence réside dans sa clé de voûte qui est le droit de vivre, i.e. le droit à des conditions minimales pour vivre décemment en plus du droit de ne pas être agressé. Pour les libertaires, ce droit de vivre peut être violé par le droit de propriété qui doit donc être aboli et remplacé par un droit de possession (j’en parlerai dans un billet subséquent, car dans les faits cela est beaucoup plus compliqué que ce que j’écris dans ce billet).

Cependant, la plupart des libertaires sont des libertaires civils (malencontreusement appelés civil libertarians en anglais) qui préconisent le maintien des services publics essentiels (i.e. instruction, santé, aide sociale et fonctions régaliennes) et le maintien d’un droit limité de propriété, tout en se concentrant sur la vision libertaire des libertés civiles et politiques. Le libertarisme civil est une approche idéologique pratique très intéressante pour l’anarcho-pragmatisme qui le considère comme un allié stratégique temporaire contre la drouate étatiste et les dictatures étatistes de gau-gauche. La forme la plus extrême du libertarisme est l’anarcho-socialisme, qui nie toute légitimité à l’État et au droit de propriété. L’anarcho-pragmatisme est une vision plus rationnelle de l’anarcho-socialisme qui reconnaît le droit de possession, ou plus précisément quelque chose qui y ressemble (j’y reviendrai un jour).

Le terme libertarien remplace le terme libéral qui était le terme utilisé avant la fin du XIXe siècle pour désigner cette idéologie. Mais étant donné que les partis politiques soi-disant « libéraux » sont devenus des partis centristes étatistes au Royaume-Uni, au Canada et au Québec (quoiqu’un certain virage vers la drouate étatiste s’y fait sentir mais pas autant que chez l’ADQ: le PLQ étant le plus étatiste des trois principaux partis au Québec) et que, pire encore, le terme liberal signifie un socialisme étatiste de gau-gauche aux États-Unis, le terme libertarian, traduit par libertarien en français, fut progressivement adopté par les zélateurs de cette idéologie. Le terme libéral classique est encore utilisé pour désigner l’idéologie libertarienne mais le terme libertarien est le plus souvent utilisé, car il porte moins à confusion.

Le terme néo-libéral est devenu au fil du temps un sobriquet péjoratif utilisé surtout par les gau-gauchistes étatistes pour désigner tout zélateur d’une plus grande liberté économique ou d’un État plus corporatiste. AJOUT 1 (merci Epistémè): Ce terme désigne aussi une réalité comtemporaine, i.e. la résurgence (variable) des idées classiques et néoclassiques dans les cercles, thinktanks et lobbys à tendance libertarienne proches du pouvoir et en économie (chez les économistes à tendance libertarienne). Et ceci, spécifiquement, par opposition au libéralisme keynésien, qui est le concept soi-disant « libéral » défendu par les partis politiques dits « libéraux » en Occident.

AJOUT 2 (Merci Arnold S): Cependant, ce terme ne décrit pas une idéologie, elle ne décrit qu’une renaissance intellectuelle contemporaine des idées à tendance libertarienne en économie et dans les cercles, lobbys et thinktanks proches du pouvoir. De plus, aucun économiste à tendance libertarienne n’utilise ce terme pour décrire son idéologie. Pour ces raisons (incluant le caractère péjoratif que j’ai décrit plus tôt), je n’utiliserai jamais ce terme dans ce blogue, sauf lors des rarissimes occasions où je ferai référence à ce billet en particulier, i.e. le moins souvent possible.

5 Réponses

  1. Le corporatisme c’est l’antithèse total de la liberté économique, j’vois pas pourquoi t’associes ça ensemble.

  2. @Cowboy

    Tout à fait d’accord avec vous!

    Ce sont les gau-gauchistes étatistes (et même plusieurs anarcho-socialistes paradoxalement) qui font cette association fallacieuse: voilà ce que je voulais illustrer.

  3. J’ai bien aimé ton blog donc je te le dis !
    bonne continuation !
    http://lalignerouge.wordpress.com/

  4. Merci et bienvenue ici! 🙂

  5. Merci, c’est tout à fait le genre de billet que j’aime lire (didactique, informatif) et je suis content de vous (re)découvrir. Pour une raison mystérieuse, je pensais que «David Gendron» était «Antagoniste», principalement parce que je pense que Antagoniste signe chez Jean-François Lisée avec le nom «David» alors je négligeais parfois de vous lire…

    En tout cas, c’est curieux comme les libertariens et les minarchistes me taxent de coco ou de socialiste (avec des suffixes totalitaires) alors que je me sens bien plus près de votre position anarchiste.

    Mon modèle est Thoreau (même s’il a brulé une forêt…), mais en même temps mon espérance (si je puis emprunter ce terme) me fait constamment défendre contre ces mêmes libertariens des positions gauchistes, étatistes que je trouve préférable aux «forces du marché» lesquelles ne sont dans nos sociétés que l’appropriation de richesse collective par des particuliers ou des groupes de particuliers, souvent contre l’intérêt du Québec.

    Quoi qu’on dise, il y a quelque chose comme une société civile au Québec et je préfère 100 fois cette dernière et ses syndicats que la clique de l’IEDM, du Patronat ou de la fédération des chambres de commerce.

    No Pasaran…

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